DEUXIEME PARTIE :

 

Prey (Dick Maas - Pays Bas)

Le hollandais Dick Maas, connu par chez nous depuis le début des années 80 pour une poignée de séries B horrifiques (L'ascenseur, Amsterdamned, Saint), est également le réalisateur de plusieurs films et d'une série comique, Flodder. Prey, son nouveau film, puise dans ces deux registres et raconte la terreur que sème un gigantesque lion à Amsterdam. Pour quiconque est un peu familier du cinéaste, on se trouve instantanément en terrain connu. Film d'horreur qui ne se prend jamais tout à fait au sérieux tout en enchaînant les bonnes idées, et assez saisissant par moments.
Il faut voir comment le parc d'Het Amsterdamse Bos se transforme, le temps d'une longue séquence de traque à faire pâlir le Spielberg de Jurassic Park, en véritable jungle. Ou comment les rues de la ville se transforment en terrain de jeu macabre le temps d'une poursuite entre le lion et un personnage qui finit par plonger dans un canal, filmé au ras du sol, dans un élan proche de celui d'Argento lorsqu'il cherche à magnifier la ville comme sublime espace de mort.
Si le récit avance un peu à l'aveuglette et si les ruptures de ton ne sont pas toujours très bien maîtrisées, l'ensemble avance avec une vigueur et une ironie mordante (la manière dont sont raillées les institutions font parfois penser à certains films de genre coréens récents) mais jamais cynique. De sorte qu'on attend de pied ferme le prochain essai de Maas, qu'on espère toujours coller au corps d'une ville décidément trop rare au cinéma.

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Hentaï Kamen : The Abnormal Crisis (Yuichi Fukuda – Japon)

En 2013 sortait Hentaï Kamen – Forbidden Superhero, très drôle parodie du premier Spider Man de Sam Raimi mettant en scène un lycéen pervers, dont l'alter-ego arborait une culotte de fille en guise de masque, un string moulant, des bas résille et talons aiguilles en guise costume. Malgré de gros problèmes de rythme et un certain systématisme scénaristique (les séquences s'y suivent et se ressemblent un peu), le film faisait mouche grâce à un humour dévastateur et un rapport bien senti au film de Raimi : Hentaï Kamen (littéralement « Masque pervers ») étant le ouvertement le héros de la frustration et du questionnement sexuel, autant que celui de la lutte contre les convenances et la bienséance. Ses ennemis, variés, incarnaient successivement la doctrine morale castratrice, le spectre de la perversion, le concurrent amoureux, etc.
La suite reprend exactement la même recette, et poursuit le vaste projet entrepris par le premier film, puisqu'il singe désormais. Spider Man 2 du même Raimi. Notre héros a désormais une petite amie, plus question de se mettre des petites culottes sur la tête. Mais le crime rôde, et le lycéen fadasse va devoir remettre son costume de pervers pour lutter. Le film a les mêmes qualités et défauts que son prédécesseur. Trop long, répétitif, mais habile dans son réinvestissement du héros créé par Stan Lee et Steve Ditko. Malin aussi dans sa réutilisation des figures du premier film, dont l'apparition donne lieu à certaines séquences très drôles : le retour des parents du héros, flic pervers pour le père, hystéro SM pour la mère. Le super-méchant à couettes est de nouveau l'occasion d'accentuer l'aspect non-sensique du film. Cet Hentaï Kamen peine un peu plus tout de même à raconter les affres d'une sexualité contrariée comme le réussissait par instants son prédécesseur.

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Innocent Curse (Takashi Shimizu – Japon)

Il y a quelques années que Takashi Shimizu, principalement connu comme le réalisateur obsessionnel de quelques six versions de Ju-On, trace son bonhomme de chemin en toute discrétion, entre relecture live de Kiki, la petite sorcière (Majo No Takkyûbin), série B horrifique produite aux Etats-Unis (Flight 7500) et film d'horreur dans son Japon natal (Ame Onna). Innocent Curse appartient lui aussi à cette dernière catégorie : une série de disparitions d'enfants correspond à l'apparition d'un étrange boogeyman. Un journaliste va mener l'enquête.
Plusieurs séquences, jouant sur l'apparition terrifiante d'enfants dans un espace qui semblait les cacher comme des œufs de Pâques (tout au long du film, les appartements sont d'infernaux capharnaüms semblant ne justifier leur existence que par les corps qu'ils cachent), font croire à un retour de Shimizu aux belles heures de la J-Horror. Autant qu'un thème sous-jacent mais, malheureusement, jamais traité : l'impossibilité pour les adultes comme pour les enfants de communiquer et de faire partager leur monde. Les beaux moments du film sont ceux durant lesquels l'espace est béant entre les deux univers, et l'horreur jaillit de l'incommunicabilité de ces deux univers.
Malheureusement, il faut qu'un insensé boogeyman mi-chat mi-corbeau fasse sombrer l'ensemble dans une fastidieuse relecture du Joueur de flûte de Hamelin, et que le scénario, manifestement écrit en roue libre totale, nous déroule une histoire toute en circonvolutions et en péripéties qui donnent le sentiment que le récit n'en finira jamais. Dommage, on trouve par ci par là de beaux moments d'épouvante contenue.

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The Limehouse Golem (Juan Carlos Medina – UK)

On n'attendait pas, après un Insensibles plutôt honnête, Juan Carlos Medina, aux commandes de ce produit de facture presque télévisuelle, réalisé sans passion et sans effort apparent. Nous sommes au XIXème siècle, Jack l'éventreur sévit à Londres, à moins que l'on vienne d'en découvrir le cadavre en la personne de John Cree, un dramaturge frustré. Sa femme, Lizzie, va raconter sa version des faits, et le film devra à la fois lever le voile sur l'identité de l'éventreur et sur celle de l'assassin de Cree.
L'enquête se développe alors proprement, suivant une mécanique huilée mais bien plate. Le film de serial killer le dispute au film d'époque qui se situe dans un Londres vaguement décadent, qui voudrait approcher un univers proche de celui d'Elephant Man (David Lynch) mais parvient à peine à signer un chromo type Moulin Rouge (Baz Luhrmann). Malheureusement le job est fait sans passion, et on attend avec patience et somnolence le fin mot de l'histoire. Qui, lorsqu'il sera prononcé, ne nous intéressera plus trop depuis un long moment.

Therapy (Nathan Ambrosioni – France)

Therapy fait le tour des festivals depuis quelques mois, auréolé d'une réputation qui ne met finalement en avant qu'une chose : l'âge du cinéaste, qui réalise son deuxième long à seulement seize ans. Aussi étonnant que cela puisse être, le tour de force est malheureusement plus logistique qu'artistique. Tourné pour moitié en found footage, pour moitié de manière traditionnelle, le film raconte l'enquête de policiers tombés sur des bandes vidéo montrant un groupe de jeunes en prise avec un assassin masqué dans un asile désaffecté.
L'ensemble se suit sans déplaisir, mais souffre tout de même d'un scénario qui ne pousse pas les possibilités offertes par son dispositif (puisqu'un personnage monte les rushes, pourquoi n'avoir pas problématisé la véracité de ce qu'on y voit ?) et d'une facture visuelle assez pauvre.

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Le serpent aux mille coupures (Eric Valette – France, Belgique)

Il est difficile de douter du profond attachement d'Eric Valette pour le(s) cinéma(s) de genre. Il a versé plusieurs fois dans le fantastique, en France (Maléfique) ou aux Etats-Unis (Hybrid, le remake de La mort en ligne de Takashi Miike) personnelle. Mais, par choix ou par nécessité, c'est finalement dans le thriller qu'il s'est illustré le plus souvent dans son propre pays (Une affaire d'état, La proie).
Il récidive ici avec un western contemporain racontant la manière dont un étau se resserre autour d'un motard, reclus dans la maison d'une famille de vignerons après avoir été impliqué dans la mort de plusieurs gangsters. Le film de traque policière s'entremêle ainsi à un récit d'assaut qui se met en place méticuleusement.
Le procès d'intention n'a pas lieu d'être, on comprend rapidement que Valette rêve d'un western brutal entre Peckinpah et Fulci. Malheureusement, il se prend les pieds dans le tapis d'un script laborieux, où la tension monte mais n'éclate jamais, et qui se trouve régulièrement alourdi par des dialogues très limités, quand bien même ils tentent de dire quelque chose sur l'état du monde (le rapport à l'autre et le racisme, principalement). A charge de revanche, on espère !

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