On n'en a jamais terminé avec Mario Bava. Précurseur du giallo, extraordinaire représentant du gothique italien, fol inventeur de formes au milieu de multiples écrins génériques qui ne se font jamais carcans, il est aussi, aujourd'hui, un étrange fédérateur. Réconciliant depuis plusieurs années un pan de la pensée universitaire (Jean-Louis Leutrat lui a accordé de très belles pages) et la passion des dévorateurs de pellicules genrées.

En marge d'une récente rénovation de certains de ses films, un petit livre est sorti il y a peu : Mario Bava, Le magicien des couleurs, du binôme Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichele. Qu'a à nous offrir un nouvel ouvrage sur le maître italien, plus de dix ans après All The Colors from The Dark, la somme de Tim Lucas ?

En toute humilité, les auteurs ne prétendent pas à l'exhaustivité ni à une révolution théorique prétendant réinventer notre manière de percevoir les films de Bava. La force du livre réside plutôt dans son statut d'introduction à l'œuvre du cinéaste, mêlant habilement récit historique passionnant (sur l'auteur, mais aussi sur certains aspects du cinéma italien, notamment son utilisation singulière du son) et analyses pertinentes, servies par un style clair et jamais pompeux. De sorte qu'il parlera aussi bien à celles et ceux qui connaissent, ou non, le cinéma de Bava.

Nous donnant régulièrement envie de revoir la plupart de ses films, Le magicien des couleurs constitue une très plaisante promenade dans une filmographie, à travers déambulations thématiques (geste, regard, poupée, son...) et référentielles (des liens sont régulièrement tissés avec de nombreux cinéastes, de Visconti à Lynch).

Si l'on regrette parfois de voir s'interrompre certaines réflexions laissant trop rapidement la place à d'autres, cet ouvrage sollicite discrètement mais de manière tenace une fascination toujours renouvelée pour les images, belles et bigarrées, de Bava.